Comme 20 autres jeunes de 10 établissements scolaires différents, il a proposé le néologisme « célébloui » comme équivalent français du mot anglais « starstruck ».
Célébloui ? Le nouveau mot permet de qualifier une personne « qui, en raison d’une rencontre avec une célébrité, est frappée d’une impression si forte qu’elle est susceptible d’en perdre ses moyens ». Comme si vous croisiez votre idole de toujours dans la rue et que, admiratif et surpris, vous vous retrouveriez sans mot devant elle…
Même si ce n’est pas la première fois qu’un néologisme gagnant est proposé par plus d’une classe, « conséconscient » ayant été soumis en 2022 par deux classes, c’est pour le moins assez inusité, reconnaissent les organisateurs du concours, de voir que 21 élèves de 11 établissements scolaires différents y sont allés de la même suggestion sans se consulter.
Encore surpris d’avoir gagné
Alors élève de 2e secondaire inscrit au Programme d’éducation intermédiaire (PEI) de la polyvalente de Deux-Montagnes, Raphaël raconte que c’est son enseignante de français qui lui a parlé du concours. Passionné de lecture, toujours prêt à se lancer dans toutes sortes de projets, il a donc suggéré des néologismes pour chacun de quatre mots anglais retenus cette année. Ce concours, précisons-le, s’est déroulé du 24 novembre au 28 février derniers et les gagnants ont été dévoilés au début du mois de juin dernier.
« Pour ‘’starstruck’’, le mot célébrité m’est immédiatement venu en tête, étant donné que c’est l’équivalent français de ‘’stars’’. Cela aurait pu être vedette, mais j’ai pris célébrité. Ensuite, pour la deuxième partie qui est ‘’struck’’, j’ai voulu prendre un autre équivalent français pour ce mot-là et j’ai décidé de prendre ébloui. Donc, la contraction du mot célébrité et ébloui a donné le mot céléboui », explique tout simplement Raphaël au sujet de la démarche qui l’a mené à créer ce nouveau néologisme qui, comme les deux autres néologismes gagnants – « évitango » et « faurevoir » – ont été intégrés dans la Vitrine linguistique de l’OQFL et sont désormais accessibles à des millions de personnes à travers le monde.
Raphaël se dit toujours surpris que sa suggestion ait été choisie en fin de compte « parce que je ne m’imaginais pas du tout que ce serait ce mot-là ou tout simplement un de mes mots qui serait retenu parmi tous ceux qui avaient été proposés ».
Surpris que 20 autres jeunes l’aient aussi suggéré ? « Oui, c’était surprenant de voir qu’on était autant à le proposer, mais, en même temps, ce sont des mots [célébrité et ébloui] que tout le monde pouvait choisir. Ce n’est donc pas étonnant finalement », lance-t-il.
Un jeune déterminé, motivé et impliqué
Son enseignante de français, Camille Forget, confirme que c’est bel et bien Raphaël qui, de son côté, a pondu tout seul le nouveau mot « célébloui ». « Il a fait énormément de propositions pour tous les mots du concours. Cela l’amusait beaucoup! Il était déterminé et je l’ai encouragé à continuer de soumettre des idées en voyant son enthousiasme. On cherchait à se démarquer; donc, nous avons consulté l’étymologie, l’historique du concours, les différentes manières de construire un néologisme. Parfois, ses amis ‘’brainstormaient’’ avec lui, mais pas pour ‘’célébloui’’ […] Il n’a pas hésité à fouiller dans les outils de référence et à explorer les différentes informations qui s’y trouvaient pour s’inspirer. Il prenait aussi plaisir à employer ses créations dans diverses phrases et divers contextes pour voir comment elles sonnaient. Il cherchait des termes fluides qu’il serait plausible d’intégrer à l’usage courant. Bref, cela montre l’étendue de son dévouement dans sa quête aux mots parfaits », raconte l’enseignante.
Quant à la mère de Raphaël, Véronique Désormeaux, elle se dit fière de son garçon, l’aîné de la famille qui compte aussi dans ses rangs Arianna, 12 ans, Ophélia, 8 ans, et papa François-Alexandre. Pour elle, cela montre que les jeunes, contrairement à la croyance populaire, ne sont pas tous et toujours sur Internet et les réseaux sociaux, qu’ils ne font rien d’autre, que c’est difficile de les motiver.
« Raphaël, il est vraiment motivé, super engagé à l’école. Mais il n’y a pas seulement lui, son cercle d’amis aussi. Ce sont de beaux jeunes qui sont intéressés d’apprendre, qui sont impliqués à l’école, prêts à donner au suivant, à aider les autres. Aussi, si, en tant que parents, on est là pour soutenir nos jeunes et qu’on est là pour les motiver, ça a un impact sur la suite des choses. Si tu ne les écoutes pas quand ils sont petits, ils ne viendront pas te raconter les choses quand ils vont être grands. Même si, toi, tu es fatigué parce que tu reviens de travailler, il faut que tu les écoutes quand ils reviennent de l’école. Les jeunes, ils en ont encore des choses à dire. Ce n’est pas vrai que quand ils reviennent de l’école, ils vont juste s’enfermer dans leur chambre », lance la maman installée avec son conjoint à Deux-Montagnes depuis 18 ans.
Pour voir les capsules vidéo portant sur les trois néologismes gagnants de cette édition 2025 du Concours de créativité lexicale et mettant en vedette son ambassadeur Pierre-Yves Lord, il suffit de se rendre sur le https://francofete.qc.ca/creativite-lexicale/neologismes-gagnants.aspx.
Depuis la toute première édition, tenue en 2019, ce sont 21 nouveaux néologismes qui ont été créés au total. Cette année, 273 classes issues de 89 écoles, pour un total de 5 519 élèves, ont participé au concours. Parmi les 726 propositions reçues, trois ont été retenues, dont, bien sûr, le mot « célébloui ».
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