Avec toutes les restructurations qui occupent nos dirigeants des boîtes médiatiques, journaux, radios et télévision, j’aurais une suggestion à faire aux journalistes sportifs; convertissez-vous en chroniqueurs économiques. Parce que, voyez-vous, les pages ou bulletins sportifs, lorsqu’ils n’alignent pas les statistiques, ne parlent que d’argent, d’argent et encore d’argent!
Pas plus tard que la semaine dernière, trois grosses manchettes sportives se résument en trois mots: argent, argent et argent. D’abord, cette ouverture du chef d’exploitation de la LNH, John Collins, à la possibilité de placarder des publicités sur les uniformes des équipes de la LNH. Voyez un peu l’image de ces horribles dossards européens, ceux que les vrais mordus peuvent admirer dans toute leur splendeur à la Coupe Spengler. Les beaux chandails du CH et des Blackhawks tatoués des logos de la Banque Nationale, Esso, Molson, La Cage aux Sports et Tutti Frutti.
Il semble par contre que le grand manitou Bettman n’était pas tout à fait séduit par cette idée, du moins pour le moment. «À moins qu’il y aurait des cargaisons d’argent à faire», aurait‑il cependant précisé. Bien sûr, défigurer les mythiques uniformes de la LNH pour quoi? De l’argent évidemment, le nerf de la guerre, surtout au prix qu’on paie les athlètes et qu’on refile sans gêne aux amateurs.
Parlant d’athlètes, Russell Martin avec un contrat de 82 millions de dollars canadiens (?) est devenu la semaine dernière l’athlète québécois le mieux payé depuis la découverte du pays en 1534. Ben oui, j’suis content pour notre p’tit (?) Québécois, mais lorsqu’on prend connaissance des articles sur le sujet, il faut se rendre au 10e paragraphe (j’exagère à peine) avant qu’on commence à parler de ce que Russell fait le mieux, jouer au baseball derrière le marbre. «Ça n’a plus aucun sens», diront certains, à qui je répliquerai que oui, c’est plein de bon sens. Ça a du sens selon le contexte dans lequel ces athlètes évoluent. Ça a du sens quand on pense que si les proprios versent ces salaires à un employé, c’est parce que les profits qu’ils en retirent en valent la peine. Si un milliardaire consent à payer près ou plus d’un milliard de dollars pour une franchise de baseball majeur, il ne le fait pas par pure philanthropie. Tant mieux pour Russell, donc, mais de quoi a‑t‑on parlé dans ce long paragraphe? D’argent, d’argent et encore d’argent!
Toujours la semaine dernière, Marc Bergevin nous a débarrassés de «l’énigmatique» René Bourque, un des plus illustres somnambules à avoir endossé l’uniforme tricolore. De quel angle ce coup de maître a‑t‑il été abordé par la presse? Le plafond salarial! On n’a pas insisté longtemps sur le fait qu’on avait envoyé le plus loin possible un fainéant qui, à part quelques étincelles en séries l’an dernier, n’a jamais justifié sa réputation d’ailier de puissance pour laquelle on l’avait d’abord acquis de Calgary. Après avoir éclairci toutes les considérations économiques, on nous a un peu éclairés sur le dossier du nouveau venu et colosse défenseur Bryan Allen. C’est donc dire qu’avant de justifier l’échange en disant qu’on larguait un traîne-savates pour muscler la défensive, on a d’abord pris bien soin d’expliquer qu’on avait échangé un contrat de 3,3 millions avec deux ans à écouler (Bourque) contre un contrat de 3,5 millions auquel il ne reste qu’un an à faire (Allen).
Avis aux fins connaisseurs qui concoctent toutes sortes d’échanges dans les bains du Centre sportif ou sur les lignes ouvertes. Laissez de côté vos connaissances du sport et faites comme nos gouvernements. Sortez plutôt vos calculettes parce qu’après tout, qu’y a‑t‑il à part le cash?