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L’aide à vivre ou l’aide à mourir ? Et si on s’y attardait…

L’aide à vivre ou l’aide à mourir ? Et si on s’y attardait…

Publié le 05/06/2024

La campagne de sensibilisation radio et internet sur le thème de « l’aide à vivre » qui a été lancėe au mois de mai dernier par le réseau citoyen « Vivre dans la Dignité » –  https://vivredignite.org/com-campagne-aideavivre/ – nous ouvre la porte à l’échange et au partage.

Après quelques pratiques de « l’aide médicale à mourir », il est bon de s’attarder un peu sur le pourquoi de ce choix et savoir s’il existe d’autres alternatives ou des bouées de sauvetage qui apaiseraient mieux les personnes qui se sentent obligées d’opter pour cette offre pour toutes sortes de raisons. Il y a des personnes qui sentent qu’elles ne valent pas chères à cause de leur maladie, de leur impotence, ou de leur manque de performance. D’autres sont dans l’indécision à cause de l’euphémisme utilisé qui prête à confusion par le choix des mots :  aide, dignité, compassion, alors qu’il s’agit bien d’euthanasie et de suicide assisté.

Le désir d’aider les personnes à voir clair avant l’irréparable n’est pas dérangeant en soi. Il est de bon aloi que « l’aide à vivre » nous rassure qu’on ne cherche pas à se débarrasser de nous et que nous demeurons importants tout en sachant que la décision finale nous revient.

Il est surprenant d’apprendre selon le récent sondage de Research Co, https://search.app/qvvz5HNj1pWFmudX7  qui surveille l’opinion publique au Canada que plus d’un Canadien sur quatre autoriserait l’euthanasie pour les sans-abris (28%) et la pauvreté (27%). Ce qui est encore plus inquiétant, c’est que le sondage a révélé que 50% des Canadiens autoriseraient l’euthanasie pour les personnes qui n’ont pas accès à un traitement médical et 51% pour les personnes handicapées.

Ces chiffres sont alarmants et dénotent un certain malaise ou plutôt un malaise certain dans notre société qui est de plus en plus individualiste. C’est à se demander si la population est rendue si dépressive et désespérée qu’elle souhaite la mort et n’a plus le goût de se battre pour améliorer la qualité de la vie. Avec ces constats, comment peut-on nous taire et ficher la paix aux mourants? Mais de quelle paix s’agit-il? Celle de ne plus vouloir être dérangé par eux?

Le problème avec le retrait du critère de fin de vie dans la loi est celui d’avoir ouvert la porte à plusieurs dérives. Selon les Statistiques tirées du plus récent rapport de la Commission québécoise sur les soins de vie (2022-2023), on apprend que seulement quatre personnes sur les 5037 ayant reçu l’AMM ont mentionné qu’il s’agissait de souffrances physiques.

À la page 18, on peut lire ceci : « La très grande majorité des formulaires font mention de souffrances en lien avec la perte de capacité à effectuer les activités qui donnaient un sens à la vie (96%) ou les activités de la vie quotidienne (92%) et la grande majorité font référence à une perte de la dignité (76%). Un peu plus de la moitié (54%), indiquent un contrôle inadéquat de la douleur ou des préoccupations à ce sujet et (59%) mentionnent un contrôle inadéquat d’autres symptômes ou des préoccupations à ce sujet. Environ 46% indiquent des souffrances en lien avec la perception de la personne d’être un fardeau pour sa famille, ses amis ou ses soignants. Un peu plus du tiers 38% font référence à la perte des fonctions corporelles et environ le quart (24%), que la personne rapportait souffrir d’isolement et de solitude. »

Il ne s’agit donc pas toujours d’une maladie grave et incurable et d’une phase terminale.

 Ces décès sont facilités, car le recours à « l’aide médicale à mourir » peut prendre moins de jours que le recours à des médecins spécialistes qui peut prendre des mois.

Comment peut-on parler d’amour et de compassion, alors qu’il s’agit d’empoisonner les personnes avec un produit létal comme celui que reçoivent les prisonniers condamnés à mort aux Ètats Unis. Ne vaut-il pas mieux leur tendre la main et chercher à les soulager de leur détresse ?

« L’aide à mourir » n’est pas une loi fraternelle quelles que soient les conditions et les circonstances. C’est avec « l’aide à vivre » et l’accompagnement dans la souffrance physique et morale des personnes souffrantes qu’on reconnaît la fraternité sociétale et la vraie compassion dont parle les dictionnaires.

Plutôt que d’encourager les gens à mourir, ne serait-il pas mieux de les aider à vivre jusqu’au bout dans l’amour? (Erwan le Morhédec).

La dignité d’une société humaine ne consiste-t-elle pas à accompagner la vie jusqu’à la mort naturelle et non à faciliter la mort?

Monique Khouzam Gendron,

bibliothécaire professionnelle, gestionnaire et et ex-directrice du Service de la bibliothèque, des services culturels et communautaires de la Ville de Saint-Eustache