Les Laurentides étaient venues en appui à travers plusieurs regroupements environnementaux de la région, exigeant au gouvernement des actions concrètes pour la protection de l’environnement.
Quatre ans plus tard, Alexis Legault, chargé de cours à l’Université de Sherbrooke, consacre son mémoire à l’étude de cette mobilisation écocitoyenne ayant rassemblé des milliers de marcheurs à travers la province. Il porte sa recherche notamment sur la dimension hautement éducative de ce mouvement qui a permis à autochtones et allochtones de tisser des liens durables.
« Mon intérêt spécifique, c’est d’aller voir à l’intérieur d’un mouvement environnemental où il y a une participation active de personnes et de groupes autochtones, ce que les gens retiennent comme savoir, comme connaissance, comme compétence. »
La Grande Marche, révèle le travail du chercheur, a joué un rôle éducatif majeur auprès des participants. « Ce qu’on voit, c’est que ce sont des gens qui ont développé des connaissances écologiques. C’est de comprendre, par exemple, c’est quoi le rôle d’un corridor écologique ou les connaissances sur des animaux, sur des plantes ».
Plus qu’un mouvement visant à exiger une plus grande justice climatique, la Grande Marche constituait, pour les participants, une courroie de transmission du savoir-faire, croit M. Legault. « […] Communiquer l’information, leur message, dans les différents médias, ce sont des choses qu’ils ont appris à faire à travers ça, de réunir des gens, de faire de la mobilisation, de s’engager, d’organiser le mouvement. »
Les apprentissages au niveau du savoir-être demeurent significatifs également, précise M. Legault, mentionnant les valeurs d’écoute, d’empathie, d’inclusion, et aussi de rapport à l’environnement qui ont émergé de ce mouvement.
Une collaboration qui porte ses fruits
Alimenté par des données recueillies sur le terrain, le travail de celui joue aussi le rôle de chargé de cours à l’Université de Sherbrooke, propose une analyse de la collaboration entre autochtones et allochtones. Il s’agit, selon lui, d’un exemple concret de la manière dont les deux nations peuvent travailler ensemble sur des causes communes, permettant aux allochtones de mieux comprendre les réalités autochtones.
« Il y a beaucoup de gens qui m’ont parlé du fait que, oui, il y avait une connaissance un peu éloignée de ce que les premiers peuples vivaient, puis de leur réalité, mais, de pouvoir être au contact de personnes autochtones dans ce contexte-là, ça leur a permis, justement, d’ouvrir leur regard sur des réalités avec lesquelles ils étaient peut-être moins familiers. »
La protection de la forêt et du territoire constitue un objectif commun ayant mené cette collaboration qui, aujourd’hui, se maintient.
Un mouvement qui perdure
Si l’évènement a eu lieu il y a quatre ans, le mouvement est loin de mourir, et la collaboration entre les participants encore moins, insiste Alexis Legault : « une bonne partie de ces gens-là qui ont participé au mouvement sont encore en collaboration, en relation, continuent de travailler, soutiennent des mouvements encore aujourd’hui.
Il en veut pour preuve la lutte menée au kilomètre 60 sur les questions de protection du territoire et la marche pour la protection du caribou organisé peu après la Grande Marche, entre autres.
« Mais il y a quelque chose qui continue de ce mouvement-là, quelque chose qui reste dans la manière dont cette collaboration entre allochtones et autochtones existe. » – Alexis Legault, chargé de cours, Université de Sherbrooke
De l’importance de l’engagement collectif
M. Legault se dit conscient de la baisse d’intérêts pour la question environnementale, laquelle était totalement absente de la campagne électorale en vue du scrutin du 28 avril 2025. Toutefois, précise-t-il, le véritable problème se situe ailleurs : « Je pense que les gens sont beaucoup plus conscients maintenant du fait qu’il y a des enjeux environnementaux. Je pense que ça paralyse beaucoup. Les gens se sentent isolés, les gens se sentent impuissants sur ces questions-là. »
L’engagement collectif est, selon lui, la véritable solution. « Je pense que la manière de créer de l’espoir, c’est en s’engageant. On s’engage collectivement. Des mouvements comme celui de la Grande Marche, c’est un exemple d’une manière où on peut s’engager collectivement pour la protection du territoire, pour l’environnement. »
« Je pense qu’on est dans ce que moi j’appelle une crise écosociale d’échelle planétaire à l’échelle mondiale. Mais je pense que c’est beaucoup par la solidarité qu’on va s’en sortir. »
Méthodologie
Pour mener sa recherche, Alexis Legault a réalisé des entrevues individuelles semi-dirigées, avec trois personnes autochtones impliquées à différents niveaux dans le mouvement, dont deux Atikamekw, ainsi qu’une femme innue.
Les résultats de la recherche seront présentés prochainement à Sherbrooke, à Montréal, dans le cadre de l’ACFAS, ainsi qu’en Allemagne lors d’un colloque au début du mois de juin.
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