Originaire de la région des Basses-Laurentides, Jean-Kristof Bouton s’est intéressé très tôt au chant d’opéra, à un âge où les jeunes préfèrent chantonner des airs pop plutôt que des airs de Caruso et Guelfucci, qui jouaient régulièrement dans la maisonnée familiale de Mirabel.
Aussi loin qu’il s’en souvienne, Jean-Kristof a toujours voulu chanter. C’est ainsi qu’il s’est lancé dans l’art lyrique avec les enseignements de la soprano Cécile Vallée-Jalbert puis lors de sa scolarité à l’école Vincent-d’Indy.
En choisissant de faire carrière comme chanteur d’opéra le jeune Mirabellois ne s’est toutefois pas dressé un chemin facile. Aventurier dans l’âme, une décision prise à la volée allait complètement faire basculer son destin malgré quelques embûches au démarrage.
Départ en Roumanie
Sur une invitation de Cristian Mihailescu, à l’époque directeur de l’Opéra de Brasov en Roumanie, Jean-Kristof décide de partir en Roumanie afin d’étudier l’art lyrique au Conservatoire national de musique de Bucarest.
Soutenu par ses parents, voilà le jeune homme qui débarque à Bucarest à 18 ans avec l’intention de s’inscrire à l’institution renommée à la toute dernière minute. Évidemment trop tard. Qu’à cela ne tienne, son insistance aura raison de la direction qui accepte d’admettre le jeune Québécois, qui ne parle pas un traitre mot de roumain.
Et sans un sou en poche. Ayant mis le pied à terre en République tchèque (le Canada n’offrant pas de vol direct vers Bucarest) il a dû dormir sur un banc quelques nuits avant qu’u préposé ait la générosité de défrayer la partie insuffisante du billet de train vers Bucarest.
Jean-Kristof raconte que la direction du conservatoire l’a hébergé sans frais durant sa première année d’études et qu’il a dû chanter dans les restaurants pour survivre.
Mais le jeune homme étant déterminé, il a travaillé si fort qu’il a obtenu une bourse d’études l’année suivante pour ensuite obtenir quelques contrats payés.
C’est au son qu’il apprendra le roumain, en plus d’ajouter l’anglais et l’italien au français, une langue communément parlée comme langue seconde en Roumanie.
Démarrage réussi
De la Roumanie, le chanteur mirabellois retient de magnifiques paysages, une nourriture traditionnelle savoureuse, la générosité d’un peuple en plus d’avoir gagné une belle-famille grâce à celle qui est devenue sa femme, une actrice roumaine qui poursuit sa carrière à Londres, où s’est établi le couple en 2019.
Après le conservatoire et la maîtrise en art lyrique, la carrière du chanteur d’opéra a décollé, et surtout en Europe compte-tenu de la longue tradition de cet art sur le Vieux Continent.
Depuis 20 ans, Jean-Kristof se promène ici et là, au fil des spectacles d’opéra pour lesquels il est recruté. Pas moins d’une vingtaine de rôles jusqu’à présent.
Car chanter l’opéra inclus aussi l’interprétation scénique afin d’assurer le déroulement d’une histoire sur fond de musicalité classique : Rossini, Tosca, La Traviata.
On lui confie souvent des rôles de méchant, dit-il. Voilà qui est surprenant au vu de son attitude laissant entrevoir un tempérament lumineux et bienveillant.
Scarpia et les autres
Pourtant, la réalité est toute autre, confie-t-il, car l’insécurité d’une carrière mené en mode «freelance» n’est jamais loin. Mais voilà le prix à payer pour une passion.
Or, sa passion contagieuse lui a été bénéfique puisqu’elle contribue à l’excellence de ses interprétations et à sa réputation grandissante. C’est ainsi qu’il a campé LE RÔLE qu’il souhaitait à tout prix camper un jour ou l’autre.
« J’ai beaucoup de chance parce que mon rôle préféré, c’était Scarpia, et j’ai eu la chance de débuter dans Scarpia il y a deux ans », souligne-t-il.
Premier opéra au Québec
Cet automne, le nom de Jean-Kristof Bouton prend parmi les huit artistes participants à la production Le Comte Ory, qui prendra l’affiche au Grand Théâtre de Québec, entre le 26 octobre et le 2 novembre.
Pour cet opéra qui mettra en vedette la musique de Rossini, Jean-Kristof se glissera dans le costume de Rimbaud. En pleines période de Croisades, le Comte Ory profite de l’absence des chevaliers pour aller séduire leurs femmes, déguisé en ermite.
« Moi, je suis un peu comme le Barbier de Séville; je facilite ça; c’est moi qui le présente. Je prépare toute la mise en scène pour lui faciliter ses aventures », indique le futur Rimbaud.
Métier exigeant
Jean-Kristof Bouton travaille fort pour réussir cette carrière si singulière qu’il s’est choisie. « C’est très physique chanter. C’est très, très dur. Ça demande un entrainement régulier, de faire attention à ce que l’on mange, à faire d’exercer sa voix tous les jours. Parce que la voix, c’est un muscle qui est très, très souple. Et que si on ne l’entraine pas, elle perd de sa souplesse, de sa force, elle perd de tout », explique l’artiste.
C’est la première fois qu’il aura l’opportunité de chanter au Québec et il espère que d’autres occasions se présenteront.
Il se considère privilégié. « Je suis reconnaissant. Je fais partie des chanceux de pouvoir gagner ma vie en étant seulement chanteur d’opéra. J’aimerais ça pouvoir tourner assez pour pouvoir venir voir ma famille plus souvent, prendre un mois par année pour venir voir ma famille sans être inquiet de ce qui va arriver après ça dans l’année.
« Mais ce qui est le plus important, c’est de vraiment faire tout ce que je peux pour que ces gens qui se sont déplacés pour venir me voir. Ils sont plusieurs à venir nous voir. Il faut vraiment leur en mettre plein la vue. Si on fait ça, on ne s’économise pas. Quand on leur a donné des émotions, qu’on les a fait pleurer, qu’on les a fait rire, qu’on les a transportés, je pense que c’est le plus beau compliment. Parce que s’ils viennent entendre de la belle musique et qu’on n’a pas réussi à les transporter, ça veut dire que nous, on n’a pas donné tout ce qu’on avait, je crois », conclut l’artiste Jean-Kristof Bouton.
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