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Une Eustachoise soutient que le mauvais triage à l’hôpital a eu raison de la mort de son père

Eve-Karine Monette veut dénoncer le mauvais triage de l’Hôpital de Saint-Eustache.

Une Eustachoise soutient que le mauvais triage à l’hôpital a eu raison de la mort de son père

Publié le 07/02/2017

C’est une femme en deuil de son père qui a tenu à relater son expérience en décembre dernier, alors qu’elle accompagnait celui-ci à l’Hôpital de Saint-Eustache, pour des douleurs intolérables dans le dos. L’histoire remonte au 15 décembre 2016, alors que Michel Monette, 66 ans, appelle sa fille pour lui demander de venir chez lui.

«J’ai quitté ma classe (NDLR: elle est enseignante) pour aller le rejoindre chez lui. Il avait tellement mal au dos qu’il en pleurait et en vomissait. Sa pression était alors à 190», relate sa fille Eve-Karine Monette.

Constatant l’état de son père, cette dernière décide d’appeler les Services préhospitaliers Laurentides-Lanaudière, afin de faire venir une ambulance.

«Au téléphone, on m’a demandé si mon père vomissait du sang, s’il avait perdu connaissance. On n’a pas pris au sérieux son état, car on m’a dit que l’ambulance serait là dans trois heures seulement.»

Trois heures d’attente

En dépit des six pontages, d’un changement de l’aorte en 1998, d’un suivi régulier en cardiologie, d’une hernie discale, de l’arthrose, Michel Monette devra attendre trois heures avant la venue de l’ambulance.

«Pourquoi avoir décidé d’attendre? Parce que l’on s’est dit qu’une fois arrivé à l’urgence, on pourrait voir rapidement un médecin», explique Mme Monette.

Lorsque l’ambulancier arrive sur place, il ne cache pas son inquiétude devant l’état du patient de 66 ans. Suffisamment pour en informer l’infirmière au triage de l’Hôpital de Saint-Eustache.

«C’est le triage que je déplore. À l’hôpital et lorsque j’ai composé le 911», soutient-elle. «J’en veux beaucoup au triage de l’hôpital, car on a banalisé les symptômes.»

Obligé d’attendre dans la salle alors que sa pression affiche 226, Michel Monette n’en peut plus.

«Il pleurait, il voulait avoir de la chaleur dans son dos. Nous avons décidé de repasser au triage. L’infirmière lui a demandé son niveau de douleur sur une échelle de 10, et mon père a répondu 10. Elle lui a répliqué que cela équivalait à se faire couper le bras à froid…», confie Eve-Karine Monette, «Mon père n’est pas reconnu pour avoir des problèmes de pression, mais à ce moment-là, elle avait augmenté et affichait 258. Elle lui a donné des Tylenol et lui a dit d’aller attendre dans la salle d’attente comme tout le monde.»

Finalement, Michel Monette ne s’endure plus, il supplie sa fille de le ramener chez lui. C’est ce qu’elle fera.

Décédé chez lui

Trois jours plus tard, alors qu’elle retourne le voir chez lui, elle le retrouve sur une chaise. Son père est mort. Selon le médecin, celui-ci est décédé depuis déjà 24 heures. Sa pression aura fait lâcher son cœur.

«Le médecin m’a dit que si mon père avait vu un docteur, il aurait été pris en charge», mentionne tristement Eve-Karine Monette, «Je veux dénoncer le mauvais triage à l’Hôpital de Saint-Eustache. Leur attitude a fait croire qu’il n’y avait rien. Je culpabilise beaucoup aujourd’hui, je me sens responsable.»

Actuellement en arrêt de travail parce qu’elle n’arrive plus à se concentrer, Eve-Karine Monette songe à porter plainte, et idéalement à envisager des poursuites. Pour l’heure, elle est soutenue par un organisme qui l’aide à colliger toutes les informations dont elle aura besoin pour le dépôt de sa plainte.

«J’ai perdu mon père, mes fils leur grand-père, mais on a perdu un enseignant aussi.»

Soutenue par sa famille et son réseau d’amis, Eve-Karine n’entend pas laisser le décès de son père pour rien.

Les commentaires du CISSS

Du côté du Centre intégré de santé et de services sociaux (CISSS) des Laurentides, on a commenté ceci:

«Il s’agit d’une triste situation qui nous désole. Nous n’avons pas encore reçu de plainte de la famille, mais nous tenterons tout de même de faire la lumière sur ce qui s’est passé. Il faut noter que nos infirmières effectuent le triage à l’urgence selon les balises de l’échelle canadienne de triage et de gravité (ETG) qui évalue l’état de santé de l’usager et permet de déterminer son niveau de priorisation. Nous allons nous assurer, dans ce cas-ci, que le triage a été effectué selon ces balises. De plus, nous ne pouvons empêcher les personnes de quitter notre urgence avant d’avoir vu un médecin. Néanmoins, si leur condition se détériore, il est nécessaire qu’elles consultent à nouveau. D’ailleurs, nous travaillons actuellement à intensifier notre collaboration avec certaines cliniques de la région nous permettant de leur référer la clientèle se présentant dans nos urgences avec des conditions de santé non-urgentes. Cela permettra notamment de réduire l’attente pour ces personnes», a indiqué Myriam Sabourin, agente au Service des relations avec les médias du CISSS des Laurentides.