Il y aurait deux fois plus de suicides parmi les agriculteurs que dans le reste de la population, selon Ginette Lafleur, chercheuse en psychologie communautaire à l’Université du Québec à Montréal (UQAM). Juste à Mirabel, trois producteurs agricoles ont mis fin à leurs jours au cours des dernières années.
Lors des consultations pour redéfinir le Plan de développement de la zone agricole de Mirabel, Bernard Laurin, un producteur agricole du coin, a mis en lumière la détresse qui guette ceux qui, comme lui, donnent leur temps sans compter à leur terre et à leur élevage.
Celui-ci a suggéré à l’administration municipale d’offrir un service d’aide similaire à celui de l’organisme Au cœur des familles, mis en place en 2001 pour répondre à la demande d’aide psychologique croissante parmi les agriculteurs.
Grâce à l’octroi de 45 000 $ de la Ville de Mirabel, pigé dans l’enveloppe du Pacte rural, ainsi qu’à la participation de la députée provinciale de Mirabel, Sylvie D’Amours, des syndicats de base de l’Union des producteurs agricoles (UPA), de quelques entreprises privées, du ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec (MAPAQ) et du support logistique du Centre local de développement (CLD) de Mirabel, une première ressource verra donc le jour à l’automne, et ce, pour un essai de trois ans.
Les agriculteurs Sophie Bélisle, Réal Brière, Thérèse Lavoie, Jean-Marie Proulx, Bernard Laurin, ainsi qu’une intervenante du Centre intégré de santé et services sociaux (CISSS) des Laurentides, Danielle Dion, composent le comité chargé de mettre en forme l’organisme. À la fin de l’été, ils embaucheront un travailleur de rang. Oui, un travailleur de rang.
Sur le même principe qu’un travailleur de rue, celui-ci répondra aux appels d’aide et se promènera également d’un propriétaire terrien à l’autre, question de leur permettre de ventiler un peu ou de leur apporter un soutien psychologique. Au besoin, il les référera à la bonne ressource d’aide. Il travaillera notamment en collaboration avec l’organisme Le Faubourg, qui s’occupe de prévention suicide.
Maria Labrecque-Duchesneau, la travailleuse sociale qui dirige l’organisme Au cœur des familles, à Saint-Hyacinthe, affirme avoir répondu à 1 152 demandes d’aide l’an dernier provenant d’un peu partout au Québec; cette ressource étant présentement la seule. Il aura fallu près de 15 ans pour qu’une seconde ressource d’aide, comme Écoute agricole Laurentides, voit le jour.
Pourtant, les besoins sont là, fait valoir Mme Labrecque-Duchesneau. C’est un milieu où la relève est de plus en plus difficile, où la moyenne d’âge est de 55 ans. Quant à la soi-disant liberté de travailler pour soi et chez soi, la travailleuse sociale soutient que la réalité est tout autre. «La seule liberté qu’ils ont, c’est de choisir ce qu’ils feront dans la journée et c’est tout», insiste-t-elle.
Cette dernière salue l’arrivée d’Écoute agricole Laurentides. «J’y crois beaucoup à cet organisme. Chaque région a ses spécificités agricoles. Puis si l’agriculteur quitte, qui va prendre sa place? Avec un organisme comme ça, on va le garder en santé, en affaires.»
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