Le Canada se trouve aujourd’hui, plus que jamais, dans l’incertitude face à des menaces incessantes de tarifs douaniers par le président américain. Pour faire face à cette perplexité, « le pays doit se réinventer ». Justin Trudeau l’a déclaré, l’ancien premier ministre Stephen Harper l’a repris, les entrepreneurs l’ont finalement compris : la diversification du marché est la meilleure voie pour tenir tête à Donald Trump et espérer sortir entier d’une éventuelle guerre commerciale.
C’est une priorité pour Ariel Rétamal, directeur général et commissaire à l’exportation à Laurentides International qui croit que « s’il y a une leçon qu’on a apprise, c’est que nous sommes très dépendants du marché américain ». M. Rétamal souligne la nécessité d’augmenter « notre capacité de résilience ». Selon lui, les nombreux accords de libre-échange signés par le Canada offrent des opportunités encore sous-exploitées.
Toutefois, la proximité géographique avec les États-Unis reste une réalité incontournable. Ce qui complique aujourd’hui les relations commerciales, de l’avis de M. Rétamal, c’est l’imprévisibilité du marché américain et l’augmentation des coûts des transactions.
Il déplore le fait que malgré la signature récente du nouvel accord commercial (ACEUM) par l’administration Trump en 2020, les tensions persistent. « L’accord ne nous protège pas des menaces actuelles », observe M. Rétamal, notant que les États-Unis continuent de chercher une balance commerciale plus favorable, même dans le cadre de ces nouvelles dispositions.
Anticiper la menace
Ariel Rétamal révèle que les entreprises canadiennes multiplient les stratégies d’adaptation face aux tensions commerciales croissantes avec les États-Unis. Selon lui, les impacts varient selon les secteurs d’activité. Certaines entreprises, explique M. Rétamal, optent pour une solution à court terme en accélérant leurs exportations et en constituant des stocks importants de l’autre côté de la frontière.
Il s’agit, selon lui, d’anticiper l’imposition des tarifs douaniers. Néanmoins, cette stratégie comporte des risques, craint-il, et prévient qu’à un moment donné, les stocks vont diminuer et c’est là que les impacts des tarifs peuvent se faire sentir.
La plus grande crainte de Rétamal concerne les répercussions indirectes sur l’ensemble de l’économie. Les premiers qui vont sentir la soupe chaude, illustre-t-il, ce sont les exportateurs, car, selon l’expert en commerce international, ces derniers sont dans l’action concrète.
Au nom de l’autonomie et des gains commerciaux
Le mouvement Desjardins, de son côté, lance un appel au calme et met en garde contre toute distraction que pourrait provoquer le contexte. Son premier vice-président, Services aux entreprises Jean-Yves Bourgeois appelle les entrepreneurs à ne pas céder à la panique, à maintenir leurs projets de croissance, tout en prenant des mesures pour atténuer les potentiels impacts.
« Le message qu’on a voulu donner […] c’est justement de ne pas s’attarder à tous les grands titres qui sortent des journaux et des publications aux États-Unis parce que les tarifs ne sont pas arrivés, même si on sait pertinemment qu’il risque d’y en avoir. »
Jean-Yves Bourgeois, premier vice-président Services aux entreprises Mouvement Desjardins. –
Lors d’une rencontre avec la chambre de commerce du cœur des Laurentides qui a rassemblé une centaine d’entrepreneurs des Laurentides la semaine dernière, M. Bourgeois a surtout insisté sur le fait que, déjà, certains facteurs contribuent à atténuer l’impact potentiel des tarifs. Il en veut pour preuve la dévaluation du dollar canadien.
« Mettons qu’il y a des tarifs de 25 % aux États-Unis, puis le taux de change, le dollar canadien s’est déprécié de 10-12 % depuis 12 mois. L’impact du tarif est juste de 13% aujourd’hui. Si une entreprise est capable d’améliorer sa productivité de 5-6-7 %, l’impact du tarif est amoindri ».
L’institution financière Desjardins se dit prête à soutenir les entreprises qui seraient affectées par d’éventuels tarifs, et propose un accompagnement stratégique aux entrepreneurs. « On va mettre de l’avant des programmes comme on a fait pendant la pandémie pour soutenir les entreprises qui sont les plus touchées ».
Une économie diversifiée dans les Laurentides
La diversité de l’économie des Laurentides, croit M. Bourgeois, pourrait lui permettre de mieux résister aux impacts des tarifs. Pour lui, « malgré qu’il y ait beaucoup d’entreprises dans la foresterie, dans l’agroalimentaire, dans le secteur manufacturier, il y a quand même une belle diversité au niveau des autres secteurs, le tourisme, la construction, les services ».
La robustesse de l’économie des Laurentides des dernières années, ajoutée au dynamisme des entreprises et des entrepreneurs, ajoute l’homme d’affaires, devraient contribuer à atténuer les éventuels impacts.
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