Le 30 septembre prochain, la Corporation du Manoir Grand-Moulin procédera à l’ouverture des soumissions des acquéreurs potentiels des deux résidences pour personnes âgées. Selon les offres, la vente pourrait être totale, partielle ou même être refusée si elle ne répond pas aux attentes de la Corporation.
Depuis son élection, le maire de Deux-Montagnes, Denis Martin, cherche une solution pour cette corporation qui coûte aux contribuables 500 000 $ par an. Il a écarté l’idée de construction d’une phase III visant à améliorer la rentabilité du site pour privilégier la vente. «Nous avons vérifié, nous sommes la seule ville au Québec à gérer une résidence de personnes âgées. Ce n’est pas notre vocation, insiste M. Martin. Il est préférable pour les résidants d’avoir affaire à un professionnel de ce secteur d’activité. Nous exigeons que les acquéreurs aient une expérience et un savoir-faire dans le domaine. Nous aurons des entrevues avec chaque candidat», de rassurer le maire. Si aucune offre satisfaisante n’était soumise, la Corporation pourrait alors chercher à transférer le Manoir vers un autre OSBL (organisme sans but lucratif).
Malgré ces précautions, le projet soulève des inquiétudes chez les résidants, principalement celle d’une éviction ou d’une hausse des loyers. Les locataires de la phase II (62 logements) ne devraient pas connaître de grands bouleversements. D’une part, ce bâtiment récent, très demandé et annoncé comme rentable à moyen terme, ne devrait pas être transformé. D’autre part, les loyers sont subventionnés, et donc garantis à prix modéré.
En revanche pour la phase I (37 logements, dont 20 occupés), construite dans les années 1970 et rénovée en 2005, la situation est plus délicate. «Vraisemblablement, les acquéreurs devront faire des investissements pour que ce bâtiment devienne rentable», reconnaît Denis Martin. Si la possibilité d’agrandir ou de construire un étage supplémentaire n’est pas à écarter, il est plus probable que ce bâtiment soit démoli pour être reconstruit. En conséquence, les locataires devraient quitter les lieux.
«Et dans les critères de sélection, sur lesquels nous n’avons pas été consultés, rien n’assure une place aux résidants actuels dans le futur édifice», regrette Max Bauchet, 84 ans, représentant des résidants au sein du conseil d’administration de la Corporation. Sur le fond, l’administrateur est d’accord avec le projet. «Je comprends que la Ville doive vendre. Je ne me suis jamais opposé à cela et j’ai convaincu les autres résidants.»
Sur la forme, en revanche, il se montre plus critique. «Quand le nouveau directeur, Michel Raby, a été nommé, nous avons été mis devant le fait accompli», regrette-t-il à nouveau.
Ce dernier est un candidat défait de l’équipe Deux-Montagnes Autrement, celle de Denis Martin, lors des dernières élections municipales. Cette nomination qui a de quoi faire grincer quelques dents de certains…
«Il a accepté sa mission pour un salaire moitié moins élevé que celui de son prédécesseur», se défend le maire Martin. «Ce n’est pas un contrat, mais un mandat de 18 000 $ par an», plaide de son côté le nouveau directeur, ajoutant: «Je ne suis pas là pour l’argent, mais pour aider la Ville à faire des économies. Et j’en suis arrivé à la conclusion qu’il fallait vendre donc, à terme, mon poste va disparaître.»
Aussi, Max Bauchet se montre également sceptique sur l’évolution des loyers. «Il n’est pas difficile de comprendre que le futur acquéreur devra augmenter les loyers pour rendre son affaire rentable. Il faut surtout s’inquiéter pour ceux qui ont peu de moyens financiers. Les autres trouveront toujours une solution.»
Sur la vingtaine de résidants toujours installés dans la phase I, dont trois couples, une moitié est en passe de trouver une porte de sortie, une autre restera jusqu’au bout. Dans pareil cas, les locataires auront un préavis de six mois avant de quitter les lieux. «J’ai obtenu que tous les résidants qui quitteront les lieux, y compris par anticipation, seront indemnisés. Ils recevront trois mois de loyer et un défraiement pour le déménagement», se félicite Max Bauchet.
Néanmoins, ce projet de vente génère du stress et certains résidants plus fragiles vivent très mal la situation. «Nous en sommes conscients et nous avons de l’empathie pour eux», de confier Michel Raby.
La Corporation souhaite conclure la vente avant le 15 décembre. Les résidants seront donc rapidement fixés sur leur avenir.