Ainsi, ce samedi-là, en matinée, une centaine de grands et petits attendaient impatiemment leur projection spéciale et privée du film d’animation Les pingouins de Madagascar. Et bon nombre d’entre eux comptent revenir.
Cette sortie au cinéma, ils la doivent à Annick Langlois, une citoyenne de Lachute dont la petite Alice âgée de 7 ans est autiste. Se désolant de voir si peu d’endroits adaptés à recevoir un enfant comme le sien, celle-ci a eu l’idée d’organiser quelques activités pouvant réunir des familles qui se privaient de sorties avec leur marmaille dérangeante par leur aspect physique ou par leur attitude en public.
Atteints de trisomie, de malformation, d’une déficience intellectuelle, d’un comportement excité attribuable au TDAH ou de l’autisme, ces enfants attirent encore le regard même s’ils vivent dans une société où règne de plus en plus l’ouverture d’esprit.
Le cinéma est l’une des premières activités auxquelles a songé Mme Langlois. L’aventure s’est révélée cependant plus compliquée qu’elle ne le prévoyait, puisque l’ensemble des cinémas contactés a refusé sa demande particulière. Seule la direction du Cinéma Saint-Eustache a acquiescé.
L’air de rien, réunir des familles avec enfants différents dans une salle de cinéma où on les autorise à se montrer simplement eux-mêmes relève de l’exploit. La projection d’un film sera adaptée en baissant notamment le volume pour ceux souffrant d’une hypersensibilité aux sons.
Déjà, les parents se disent enchantés de leur deuxième sortie cinoche, qui leur permet de sortir de l’isolement. Leur mission de vie peut se révéler lourde avec un enfant différent, surtout qu’un handicap ne vient souvent pas seul.
Dominique, qui est maman de quatre enfants handicapés, sort peu de sa résidence de Pointe-Calumet avec sa troupe. Trop compliqué. Et surtout, «on se fait regarder, on dérange», dit celle qui a renoncé à sa carrière de sexologue pour prendre soin de ses quatre bambins.
En ce samedi matin, Dominique a emmené seulement deux de ses enfants au cinéma. «Impossible de sortir les quatre en même temps», spécifie‑t‑elle.
Nancy, une Mirabelloise maman d’un garçon souffrant du syndrome d’Asperger, souligne l’apport positif de cette sortie cinoche. «Ça permet de sortir de l’isolement et ça fait socialiser nos enfants», soutient‑elle.
Chantal Frenette, qui enseigne à des enfants inscrits dans l’une des trois classes «défis multiples» de la Commission scolaire de la Seigneurie-des-Mille-Îles (CSSMI), note que ces enfants ont pourtant besoin de vraies sorties avec leurs parents. «Ça leur permet de vivre une belle expérience sans le jugement et le regard des autres. Car ils savent lorsqu’on les regarde», assure l’enseignante.
Annick Langlois a ouvert une page sur Facebook appelée «Alice au pays des merveilles; autisme», pour informer d’autres parents comme elle des différentes ressources dont ils disposent. Elle compte également organiser d’autres évènements, peut-être même des sorties au restaurant. «Et pourquoi pas!» se dit‑elle, invitant les gens à «aimer» sa page Facebook pour en savoir davantage.